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Lors de la session de fin septembre 2022, le Grand Conseil a suivi la position du groupe vert’libéral – le Centre sur un postulat UDC, étonnamment contre l’avis du Conseil d’État, qui lui intimait de renoncer systématiquement à l’installation d’infrastructures photovoltaïque dans les zones agricoles. Une hérésie, alors que la Suisse doit multiplier ses sources d’approvisionnement en électricité indigène. C’est sur cette base que le député suppléant Maxime Auchlin a déposé une motion visant à poser les bases de l’agrivoltaïsme dans le canton de Neuchâtel – désormais acceptée par le Conseil d’État.
À la clé : des possibilités de synergie intéressantes entre agriculture et production d’énergie verte et ainsi augmenter nos chances d’atteindre la neutralité carbone aussi rapidement que possible.
Sécurité alimentaire et production d’énergie renouvelable ne sont pas antinomiques, bien au contraire ! Des synergies favorables ont même pu être démontrées : là où des cultures nécessitent des protections contre les éléments, ce sont potentiellement des panneaux photovoltaïques (PV) semi-transparents qui peuvent être exploités. Cette double utilisation peut apporter des avantages intéressants : protection contre un ensoleillement trop intense (particulièrement en période de canicule), bouclier contre la grêle ou de fortes pluies, structures permettant la génération de courants frais au sol, tant d’exemples qui peuvent être démontrés pour des cultures telles que les petits fruits et légumes (fraises, framboises, doucette) ou herbes aromatiques, pour n’en citer que quelques-unes. Avec, à la clé, des économies de plastiques et une réduction de l’utilisation des pesticides. Et, en bonus, une importante production d’électricité renouvelable. Avantage important : lorsque l’on parle de cultures maraîchères, ce sont rapidement des hectares de panneaux solaires potentiellement exploitables ! Un seul hectare d’agri-PV équivaut à la consommation de 250-300 ménages.
En corollaire, il convient aussi de considérer les poses de panneaux solaires verticalement en bordure de chemin agricole, telles des barrières, par exemple. Le potentiel est particulièrement important en hiver : un panneau vertical peut capter la lumière rasante, voire, encore mieux, la lumière réfléchie par le manteau neigeux. Par son orientation, pas besoin de s’inquiéter de le déneiger.
L’agrivoltaïsme en chiffres, c’est un potentiel d’augmentation des rendements de 17% (en moyenne) sur la production de doucette, selon l’Université des sciences appliquées de Zurich (ZHAW). Suivant les solutions et cultures, les augmentations s’échelonnent de +5% à +25% par rapport aux pratiques standards. Plus globalement en Suisse, la protection des cultures avec des solutions agri-PV, sur seulement 3% des terres agricoles suisses, permettrait de produire la moitié de la consommation électrique actuelle qui n’est pas couverte par l’hydroélectricité. Sans sacrifier inutilement des surfaces agricoles. Ce potentiel productif est à combiner bien entendu avec les possibilités de recherche et développement (R&D) ainsi que de partenariats public-privé d’entreprises et institutions neuchâteloises actives dans le PV et la transition écologique.
En Suisse, la mise en place de systèmes agri-PV est entravée par le cadre relatif à l’aménagement du territoire, selon l’enchevêtrement réglementaire cantonal et fédéral en vigueur. La Confédération a fait une partie du travail avec la modification de l’Ordonnance sur l’aménagement du territoire entrée en vigueur au 1er juillet 2022, et la modification de la Loi sur l’aménagement du territoire, qui vise à ancrer certains principes dans ce sens, est en cours de traitement par le Parlement. Mais les cantons ont aussi leur part à fournir. Les cantons de Berne et de Bâle-Campagne ont déjà accepté des motions du genre.